La neurodiversité est encore méconnue et entourée de préjugés. Or les personnes neuroatypiques peuvent jouer un rôle très précieux dans la communauté. En ce mois de sensibilisation à l’autisme, rencontrez Alison, une infirmière dans notre établissement dont le parcours a demandé une détermination hors du commun.
« En France, j’étudiais dans le domaine des prothèses dentaires. Mais je cherchais un métier offrant plus de contacts humains, où je pourrais davantage communiquer et travailler dans une relation d’aide. J’avais envie de changer d’environnement. »
– Alison
C’est ainsi qu’elle est arrivée au Québec en 2016 pour entreprendre des études en soins infirmiers, commencées au Cégep de Baie-Comeau et complétées quelques années plus tard au Cégep de Drummondville. Entre-temps, elle a travaillé comme préposée aux bénéficiaires, notamment dans un CHSLD de la Côte-Nord. C’était tout un dépaysement pour la jeune Française!
Une fois son titre d’infirmière obtenu, Alison a été embauchée au CIUSSS de l’Estrie – CHUS. Elle a travaillé au sein de l’équipe volante pendant un peu plus de deux ans, ce qui lui a permis de découvrir plusieurs secteurs : pédopsychiatrie, santé mentale adultes, gérontologie et hémodialyse. Depuis 2023, elle pratique à l’urgence en santé mentale et unité de stabilisation rapide de l’Hôtel-Dieu de Sherbrooke.

« C’est une spécialité que j’apprécie particulièrement pour l’accompagnement humain et individualisé qu’elle propose. Cela correspond à mes valeurs et à ma façon de travailler. »
Pourquoi Alison a-t-elle dû faire preuve d’une détermination hors du commun?
Se réorienter professionnellement tout en changeant de pays représente un défi de taille pour n’importe qui. Alison a dû s’habituer à un nouvel accent, à des mots différents, au tutoiement beaucoup plus répandu qu’en France… Et pour cette jeune femme, qui vit avec un trouble du spectre de l’autisme (TSA), une dyslexie et une dysorthographie, les défis ont été multipliés par dix.
« Il m’a fallu beaucoup de persévérance et de patience. Heureusement, pendant mon parcours scolaire, j’ai bénéficié d’un accompagnement adapté et bienveillant qui a beaucoup facilité mon intégration. »
Aujourd’hui encore, comme infirmière, Alison apprécie les accommodements qui lui permettent de bien pratiquer son métier. Par exemple, elle peut avoir besoin d’un peu plus de temps pour rédiger ses notes. Elle ressent aussi parfois le besoin de valider ses perceptions auprès de ses consœurs. L’ouverture et la compréhension des gestionnaires et de ses collègues sont précieuses.
Des caractéristiques qui peuvent se révéler des atouts
Alison estime que sa propre expérience de vie l’a sensibilisée à l’importance de faire preuve de bienveillance, de patience et de douceur avec les usagers et usagères. Mais elle a aussi une petite touche bien à elle :
« Mon ton monotone [une caractéristique présente chez certaines personnes qui vivent avec un TSA] peut contribuer à créer un espace de non-jugement, ce qui peut être rassurant et sécurisant pour les usagers qui se trouvent à l’urgence en santé mentale. Cela leur permet de se sentir plus en confiance. Je pense que cette approche crée un environnement sécurisant, où les usagers ne se sentent pas jugés par le ton, et peuvent mieux ressentir l’attention bienveillante qui leur est portée. »
Alison dit réfléchir actuellement à des moyens d’améliorer cette approche basée sur le ton, afin de la rendre encore plus efficace.
Bien accueillir les collègues neuroatypiques
On peut se sentir pris au dépourvu ou mal outillé pour accueillir dans l’équipe un ou une collègue neuroatypique. On peut hésiter sur le comportement à adopter, se demander quelles questions on peut poser et quelles sont à éviter… Alison nous donne des pistes :
« Je recommande aux équipes d’être respectueuses et d’écouter les perceptions de leurs collègues neuroatypiques. La clé d’une communication inclusive est de reconnaître que chaque personne a des besoins et des atouts uniques. Il ne faut pas hésiter à s’informer, par exemple sur l’autisme : il existe des ressources. En offrant un environnement sans jugement et de l’ouverture, on facilite l’intégration des personnes neuroatypiques. Du même coup, on développe nos aptitudes pour mieux soutenir la diversité des usagers. »
Et si je suis une personne neuroatypique qui intègre une équipe?
Chaque personne vit sa situation de façon différente. Alison, elle, a choisi d’être ouverte avec ses collègues et de partager son vécu pour sensibiliser et déconstruire certains stéréotypes.
Une femme engagée
Parallèlement à sa carrière comme infirmière, Alison est impliquée dans des initiatives pour sensibiliser la population à la neurodiversité :
- Elle a participé, en tant qu’auxiliaire de recherche, au Laboratoire inclusif de l’Université de Sherbrooke.
- Elle donne des conférences pour sensibiliser le public à ce sujet.
- Elle fait partie du comité consultatif en équité, diversité et inclusion (EDI) de notre établissement.
Photo d’en-tête : Alison Jolly, infirmière au CIUSSS de l’Estrie – CHUS