Quand Aïssé et Angélique se sont rencontrées au travail il y a quelques années, elles étaient loin de s’imaginer qu’elles partageaient bien plus que leur couleur de peau et l’uniforme d’infirmière. Le désir commun de s’impliquer pour mieux faire connaître les réalités des personnes noires ou métissées les a menées à fonder l’organisme BlackEstrie. Une initiative qui fait évoluer les pensées sur la diversité culturelle, tant dans leur milieu personnel que professionnel.

Une rencontre déterminante


Aïssé est infirmière clinicienne et travaille au centre de régulation régional des services préhospitaliers d’urgence, au sein du CIUSSS de l’Estrie – CHUS. C’est avec toute la douceur et la sensibilité qui la caractérisent qu’elle répond aux usagers et usagères qui téléphonent au 911, mais qui n’ont pas nécessairement besoin de soins urgents. Elle les questionne, les écoute, puis les oriente vers la ressource la plus appropriée selon leur état (urgence, GMF, services psychosociaux, etc.).

Quant à Angélique, elle est infirmière auxiliaire au CIUSSS de l’Estrie – CHUS depuis environ sept ans. Passionnée par son métier, elle soigne les usagers et usagères au 6eC de l’Hôpital Fleurimont. Son quotidien est ponctué de prise de signes vitaux, de soins de plaie et de médication à donner, mais surtout d’écoute.

Être en contact avec des personnes diversifiées, ayant chacune une histoire et une expérience uniques, c’est ce qu’elle aime le plus.

Aïssé Touré, infirmière clinicienne et cofondatrice de l’organisme BlackEstrie

Aïssé Touré

Angélique Goguen-Couture, infirmière auxiliaire et cofondatrice de l’organisme BlackEstrie

Angélique Goguen-Couture

Alors qu’Angélique a grandi au Québec (elle a des origines républicaines, mais est née à Haïti et a été adoptée par un père canadien et une mère américaine), Aïssé est arrivée en Estrie en 2014. Elle a fait partie d’un groupe d’infirmières et d’infirmiers diplômés hors Canada embauchés par notre établissement. Ses origines sont africaines (Sénégal et Mali), mais elle a grandi à Paris.

C’est lors d’un quart de travail, il y a environ cinq ans, qu’Angélique et Aïssé se sont rencontrées.

« À l’époque, il y avait encore peu de membres du personnel à la peau noire. Naturellement, on va vers les personnes qui nous ressemblent et c’est ce qui est arrivé. Angélique et moi avons entamé la conversation et, rapidement, une belle amitié est née. »

– Aïssé

La petite histoire derrière la grande communauté de BlackEstrie

 

En 2020, Aïssé et Angélique ont été grandement touchées par le décès de George Floyd, aux États-Unis, et le mouvement Black Lives Matter qui s’en est suivi (un mouvement visant à mettre fin au racisme envers les personnes noires). Pour elles, pour leurs enfants et pour leur entourage, elles refusaient de se taire face à cette situation. Elles voulaient agir, mais autrement qu’en manifestant. Les deux femmes voulaient plutôt intervenir d’une façon qui leur ressemblait : de manière positive et pacifique, soit par l’éducation et par la sensibilisation.

C’est sur ces prémisses qu’est née BlackEstrie, une plateforme dédiée à la et métissée en Estrie et ailleurs au Québec. Blackestrie  est un mouvement inclusif qui a pour objectif de créer des échanges et maillages interculturels entre la société d’accueil et les communautés immigrantes. 

En plus de leur page Facebook, où Aïssé et Angélique partagent des portraits de personnes inspirantes et des ressources communautaires, elles ont leur propre émission à la télé communautaire MaTV : Personne n’en parle (un petit clin d’œil à l’émission Tout le monde en parle). L’engouement est si grand qu’elles en sont à leur troisième saison.

Elles abordent des sujets comme :

 

  • le colorisme,
  • le stéréotype de la femme noire,
  • l’éducation
  • et bien d’autres.

« BlackEstrie, c’est aussi un lieu de rassemblement et d’échanges interculturels. On organise des activités (brunch des femmes, conférences, afro-pique-nique, etc.) qui s’adressent à tous, peu importe la couleur de peau. »

– Angélique

Sensibiliser à la diversité culturelle, même au travail

 

Même en 2023, il reste encore beaucoup à faire pour que les personnes noires se sentent incluses. À l’occasion, Angélique et Aïssé vivent ou sont témoins de situations discriminatoires, parfois même sans que cela ne soit fait de façon volontaire (d’ailleurs, Aïssé nous fait part des défis vécus dans une vidéo).

Beaucoup de ces situations rappellent l’importance de faire davantage connaître la réalité des personnes de différentes cultures. Les deux femmes constatent que la clé réside dans la communication : « Il faut s’éduquer et discuter avec les gens qui sont différents de soi. Parler, ça ouvre l’esprit. »

Bien sûr, de par leur nature hyper sociable, Angélique et Aïssé apprécient discuter de diversité culturelle avec leurs collègues, qui se montrent très intéressés à en apprendre davantage. Elles constatent que l’ouverture dont fait preuve leur équipe se ressent avec les usagers et usagères d’autres cultures. « On voit de plus en plus d’usagers et usagères de différentes ethnies. Surtout dans un travail basé sur la relation d’aide, ça aide de comprendre les habitudes et les façons de communiquer. » – Angélique

 

Impliquées auprès de la relève infirmière

Les deux fondatrices de BlackEstrie s’impliquent également au sein de la relève infirmière, notamment en donnant des conférences. Aïssé, qui est arrivée en Estrie avec une cohorte d’infirmières diplômées hors Canada, redonne au suivant. Elle sera bientôt marraine d’infirmières étrangères.

Bientôt marraine d’infirmières étrangères

Aïssé a participé au midi-causette du comité jeunesse de l’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec.

 

Comme Angélique et Aïssé, vous aimeriez partager votre histoire et ainsi inspirer vos collègues qui s’intéressent à l’équité, à la diversité et à l’inclusion? Écrivez à edi.ciussse-chus@ssss.gouv.qc.ca.

 

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Photo d’en-tête : Aïssé Touré et Angélique Coguen-Couture

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