La pandémie a mis le réseau à l’épreuve comme aucune crise auparavant. De nombreuses infirmières ont dû être réorientées vers des secteurs en besoin. Une situation exceptionnelle, gérée par deux équipes engagées.
Printemps 2020. Le Québec est dans la tourmente, le CIUSSS de l’Estrie – CHUS aussi. La COVID-19 s’infiltre dans toutes les activités, partout sur le territoire. Déjà importante, la pénurie d’infirmières devient aiguë. De surcroît, plusieurs attrapent le virus. Il faut soutenir les équipes, c’est prioritaire! Commence ainsi le plus grand délestage jamais vu dans l’organisation.
« Pas simple de transférer des infirmières pour combler les besoins urgents d’autres secteurs. La plupart appréhendaient des milieux inconnus, craignant de manquer d’expertise. Ou de se retrouver en zone contaminée. Parfois, je restais au téléphone tard le soir pour trouver des solutions. »
– Audrey Perron, coordonnatrice à l’organisation du travail et des soins infirmiers
Audrey et son équipe ont planifié les transferts d’infirmières pendant la pandémie. Elles y ont travaillé avec leurs collègues des ressources humaines.
Une responsabilité qui leur prenait 100 % de leur temps lors des premières vagues.
Saluons ces héros quotidiens
Des centaines d’infirmières ont ainsi quitté leurs tâches habituelles pour aller aider ailleurs. Des infirmières d’équipes volantes en courte durée sont allées en résidences privées pour aînées (RPA). D’autres ont donné un coup de main dans des CHSLD en éclosion. Certaines infirmières passaient d’une zone chaude à l’autre pour soigner des patients atteints de la COVID-19.
Les infirmières et les autres professionnels réaffectés ont eu de nombreux défis à relever. Ils ont dû s’adapter à différents quarts de travail. Ou travailler le week-end. Leur vie personnelle a été chamboulée. Jour après jour, leur engagement a rudement été mis à l’épreuve. Malgré la tempête, ils se sont montrés compréhensifs. Ils avaient à cœur de soutenir les usagers et les collègues.
Les mots manquent pour leur dire merci.
« Ça a été difficile pour les personnes réaffectées. Elles avaient peur du virus, vivaient du découragement, parfois de la colère et de l’incompréhension. C’était une intense charge émotionnelle à gérer. Sans oublier l’inquiétude dans les unités et secteurs obligés de céder des ressources. Ces gens craignaient pour leur propre offre de services. Tout le monde était réticent, mais nous n’avions pas d’autres options. Des choix s’imposaient. »
– Audrey Perron
Avec compréhension et douceur, l’équipe d’Audrey a aidé les infirmières réaffectées de son mieux. La plupart du temps, elles pouvaient rester dans leur RLS. On tentait de leur aménager des horaires sensés. On essayait de les envoyer dans des milieux connus, dans la mesure du possible. On les accompagnait, toujours avec l’objectif de répondre aux besoins prioritaires.
Des centaines de formations nécessaires
Guy Bouchard est coordonnateur par intérim aux soins infirmiers, secteur compétences, soutien et encadrement clinique. Avec son équipe, il a lui aussi aidé les infirmières des secteurs délestés.
« Nous devions les accueillir et les former à leurs nouvelles tâches. Certaines possédaient les bases de leur affectation temporaire, d’autres pas du tout. On créait des formations sur mesure. On les adaptait parfois à la dernière minute selon le profil des personnes réaffectées. Il fallait composer avec du personnel craintif et déstabilisé. »
– Guy Bouchard, coordonnateur par intérim aux soins infirmiers, secteur compétences, soutien et encadrement clinique
L’équipe de Guy Bouchard a aidé les infirmières des secteurs délestés à se former.
« Quelque 650 préposés aux bénéficiaires ayant reçu une formation accélérée sont arrivés en 2020. Ils sont venus soutenir les équipes de soins. Nous avons aussi dû les intégrer et les superviser. Les finissants en soins infirmiers ont vu leur cursus de formation et leurs stages bouleversés. Ils n’avaient pas autant de bagage que d’habitude. Il fallait guider davantage tout ce beau monde, de façon virtuelle, en plus. »
– Guy Bouchard
L’équipe de Guy a même conçu une formation impromptue pour les CEPI, c’est-à-dire les candidates à l’exercice de la profession infirmière. « Le taux d’échec de nos CEPI à l’examen de l’OIIQ augmentait. Elles avaient besoin d’aide. Nous avons donc créé un programme pour encore mieux les préparer à l’examen. En pleine pandémie. Ça a bien marché finalement! »
Un délestage de mieux en mieux organisé
Audrey est très fière de l’équipe d’organisation du travail et des soins infirmiers. Guy l’est tout autant de l’équipe du secteur compétences, soutien et encadrement clinique.
Solidaires et engagées, leurs équipes ont toujours gardé le cap malgré la fatigue. Et elles continuent de le faire.
« Notre devoir : garantir les meilleurs soins et services possibles. Au fil des vagues, on a de mieux en mieux organisé le délestage. On a pris de l’expérience, et le personnel savait davantage à quoi s’attendre. C’était un peu moins ardu. Et un peu moins stressant pour les infirmières. Néanmoins, procéder à du délestage n’est jamais simple. Il faut le faire dans des conditions les plus acceptables qui soient. Mon groupe a travaillé dur pour ça. Il y a vraiment mis tout son cœur. »
– Audrey Perron
« Les membres de mon équipe se sont toujours soutenus. Réparties sur le territoire, les conseillères partageaient leurs bons coups, leurs outils, leur vécu. Grâce à TEAMS – merveilleuse technologie! – elles sont restées liées et solides. Leur engagement était beau à voir. Tout comme leurs idées pour aider les ressources délestées et parfois démunies. Elles-mêmes ont été déplacées quelquefois pour aller s’occuper d’usagers. Elles ont vécu cette réalité de près. »
– Guy Bouchard
Le délestage a bouleversé le personnel des soins infirmiers. Mais des équipes compétentes ont humanisé et facilité ce passage obligé. Pour le bénéfice des usagers, mais également du personnel délesté.
À ces équipes, un grand merci.
DU PIRE NAÎT PARFOIS LE MEILLEUR…
On le sait, les CHSLD ont été durement éprouvés durant la pandémie. Les équipes d’Audrey et de Guy ont réagi pour susciter l’intérêt et la rétention de la relève. Elles ont créé un programme d’externat visant les étudiants universitaires en soins infirmiers.
Ce programme améliore l’accueil, l’intégration et l’organisation du travail des externes en CHSLD. Désormais, chaque externe universitaire de 1re année réalise un stage en longue durée. Un stage le préparant à mieux assumer ses responsabilités d’infirmier ou d’infirmière. Et ça marche. Durant l’urgence sanitaire, la plupart d’entre eux sont restés après leur stage. Ils ont continué à venir en CHSLD, malgré leur retour aux études.
L’OIIQ a salué ce nouveau programme d’externat. Le Secrétariat international des infirmières et infirmiers de l’espace francophone aussi.
L’initiative est finaliste aux Prix d’excellence 2022 du MSSS. On se croise les doigts!
L’équipe a même produit une vidéo sur la pratique infirmière en CHSLD. À voir!